Le dimanche 29 juin 2024, la pièce « Te lécher jusqu’à m’etouffer, la bite des meufs et le lesbianisme » a fait l’objet d’une lecture théâtrale au festival Les corps lesbien-nes, à la parole errante demain.
J’y jouais avec la comédienne transgenre Alice Manuel Lopez Djebli une lecture mise en scène par Ariane Eolac. La pièce traitait de la stigmatisation qui vise les femmes trans en couple lesbien. Ce texte abordait également la biphobie et la bisexualité féminine en général.
A 30 minutes de lecture, un individu caché dans le public a fait irruption sur scène et a répandu de la peinture rouge en criant « ça suffit ! Libération homosexuelle ! »

L’individu a revendiqué une action inspirée des militants d’Act’Up qui utilisaient dans leurs happenings de la peinture rouge, symbolisant le sang des victimes du VIH sur les mains des responsables de la crise SIDA. Il a expliqué que la pièce promouvait des pratiques oppressives envers les femmes lesbiennes. L’équipe de bénévoles du festival a escorté l’individu hors du festival. La pièce avait également fait l’objet de tweet haineux le mois précédent, ainsi que d’un collage transphobe le matin même dans la rue du festival. J’avais personnellement reçu plusieurs messages de femmes m’expliquant que les lesbiennes n’aimaient pas les pénis, ou encore que c’était lesbophobe que je force les lesbiennes à accepter les femmes trans dans leurs espaces. Nous avons été programmées par les corps lesbien-nes, nous n’avons forcé personne, et le festival s’est montré très soutenant. Je n’ai personnellement aucun doute sur le soutien de la communauté lesbienne concernant cette pièce. Malgré l’interruption, nous avons décidé de finir la pièce.
Je remercie infiniment le public et le festival les corps lesbien-nes pour leur soutien, leur intervention pour faire sortir le militant anti-trans, pour l’espace de parole qui a été donné à Alice pour échanger après cet évènement.
Assimiler la présence des femmes lesbiennes et bisexuelles trans dans l’espace lesbien a une menace est violent. Alice Manuel Lopez Djebli ne méritait pas ça. Les femmes trans présentes dans le public ne méritaient pas ça. Les organisateurices du festival ne méritaient pas ça. Bien sûr, à titre personnel, je ne crois pas que je mérite non plus de me retrouver à lire ma pièce dans une mare de peinture rouge, parce que je parle de la femme que j’aime en public.
Alors je partage avec vous ce que nous disions quand nous avons été interrompues…
« En 2022, les groupes américains d’extrême droite ont dépensé 6 millions de dollars de publicité anti trans pendant la campagne électorale. Si vous vous demandez si on n’en parle pas un peu trop, si on est du bon côté de l’histoire, si il n’y a pas un peu de victimisation de la part des meufs trans, de ce que je lis et vois depuis cinq ans, je pense que je ne pourrai pas me regarder dans la glace dans quinze ans si aujourd’hui je ne participe pas à l’effort militant contre la désinformation TERF et fasciste, sachant le nombre de femmes trans que je côtoie. »
Extrait de « te lécher jusqu’à m’étouffer, la bite des meufs et le lesbianisme », Floralie Resa
Nous avons décidé avec Alice de finir notre lecture. Je remercie encore le public pour l’accueil chaleureux qu’il nous a fait et le soutien que nous avons ressenties.
Suite à l’attaque, j’ai été contactée par Act’Up Paris qui m’a communiqué son soutien par message :
« Un de nos militants nous a fait remonter l’attaque transphobe que vous avez subi, ton équipe et toi. Nous voulions t’adresser tout notre soutien inconditionnel. Sache que toute récupération et tout détournement de nos modes d’actions à des fins transphobes est inacceptable. C’est une insulte à nos mortEs, en premier lieu les personnes trans mortes du Sida, et cet acte nous sali. »
Le festival les corps lesbien-nes a également fait un communiqué de soutien le 9 juillet 2024 sur instagram : « en contemplant votre haine »